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[Portrait] André Peytavin : un des meilleurs argentiers du Sénégal

Rédigé par leral.net le Samedi 30 Octobre 2021 à 23:00 | | 0 commentaire(s)|

Ils sont nombreux les Sénégalais d’origine étrangère à occuper des postes de responsabilité au sein du Gouvernement et autres institutions étatiques. C’est le cas de feu André Peytavin, première personnalité à diriger le Ministère des Finances et des Affaires économiques. André Peytavin est un Sénégalais d’origine roumaine décédé le 03 février 1964 à l’Hôpital principal […]

Ils sont nombreux les Sénégalais d’origine étrangère à occuper des postes de responsabilité au sein du Gouvernement et autres institutions étatiques. C’est le cas de feu André Peytavin, première personnalité à diriger le Ministère des Finances et des Affaires économiques.

André Peytavin est un Sénégalais d’origine roumaine décédé le 03 février 1964 à l’Hôpital principal de Dakar. Il était âgé de 38 ans. Aujourd’hui, celui qui avait reçu un hommage mérité de la Nation sénégalaise pour services rendus a laissé une forte impression aux autorités qui l’ont honoré à titre posthume. Premier argentier du Sénégal, il est le parrain du bâtiment central du Ministère de l’Économie et des Finance, avec le Centre Peytavin bien connu des fonctionnaires et agents de l’Administration, de même que l’avenue Peytavin au Plateau, qui part du rond-point Sandaga à la Direction générale de la Poste, et le lycée technique André Peytavin de Saint-Louis.

Ce docteur vétérinaire, diplômé de la célèbre école de Maisons-Alfort, en banlieue parisienne, avait décroché son Certificat d’études supérieures des Sciences physiques, chimiques, naturelles et génétiques et un autre diplôme de l’Institut d’élevage et des industries animales des pays tropicaux. C’est au Sénégal qu’il avait débuté sa carrière de fonctionnaire en qualité de Chef du Laboratoire de biochimie physiologique et médicale au Laboratoire fédéral de l’élevage de Dakar, en 1952.

Il fut administrateur de la Société sénégalaise de publicité et de la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (Bceao). Il servit dans le premier Gouvernement de la Loi-cadre de 1958 avec le titre de Ministre des Finances du 18 mai 1957 au 04 avril 1959, avant de continuer avec l’équipe du Sénégal indépendant. Dans le nouveau Gouvernement, il occupe le poste de Ministre des Finances et des Affaires économiques. Se considérant comme un Sénégalais, il n’hésita pas à prendre la nationalité du pays d’accueil à l’indépendance et participa à la mise en place de l’Union monétaire ouest africaine (Umoa), l’ancêtre de l’Union économique et monétaire ouest-africain (Uemoa).

À l’annonce de son décès, à la suite d’une courte hospitalisation, l’ancien Président Léopold Sédar Senghor soulignait, dans son message à la Nation : « C’est l’un des meilleurs artisans du Sénégal nouveau, un collaborateur sûr et dévoué ». « Il tenait à s’informer lui-même des problèmes soumis à sa compétence et n’hésitait pas à effectuer de fréquents voyages en brousse pour se rendre compte, sur place, des besoins et des possibilités », avait témoigné l’ancien Chef de l’État. Ce fut l’occasion pour le Président de la République d’annoncer, dans l’ancêtre du quotidien national « Le Soleil », « Dakar-Matin », des obsèques nationales pour l’ancien Ministre du Commerce, de l’Industrie et de l’Artisanat qu’il considérait comme « un grand commis de l’État ».

André Peytavin fut, en outre, un administrateur du Fonds monétaire international (Fmi) où il effectua des sorties remarquables pour défendre les intérêts des États africains et des pays du Sud. Au cours d’une sortie à Washington, aux États-Unis, à l’Assemblée générale des Gouverneurs du 17 au 22 septembre 1962, il avait souhaité plus de libéralité dans les prêts internationaux.

« La Banque mondiale et ses filiales devraient accorder plus de libéralité à des projets dont la réalisation n’est pas confiée à des entreprises à majorité privée », avait dit le délégué du Sénégal. Et d’ajouter : « Le socialisme africain n’est pas une philosophie, a priori, il répond à des nécessités inscrites dans les faits ». Il poursuivait : « Si un grand nombre d’industries ont été prises en charge par des sociétés à majorité publique, c’est parce que l’initiative privée ne s’est pas manifestée ». Aussi avait-il regretté l’opposition du Fmi à toute formule de compensation automatique des déficits dans la balance des paiements. Ce problème, avait-il martelé, revêt une importance particulière pour le Sénégal, un pays à économie de monoculture. Il avait suggéré l’adoption d’une large politique de redistribution de produits agricoles et alimentaires à l’échelle mondiale. Au nom de tous les pays africains d’expression française, c’est lui aussi qui avait dénoncé, devant le Conseil d’administration du Fmi, que le français devienne au même titre que l’anglais langue officielle de travail de cette institution financière.

 

À l’origine de la création de la Cour de discipline budgétaire

Lors du vote du budget de 1962-1963, devant les Députés, M. Peytavin expliquait que le Gouvernement veillera à sa bonne exécution et va accroitre l’efficacité de son contrôle sur la gestion des crédits de façon que tout détournement, tout gaspillage soit évité ou sévèrement réprimé. C’est ce jour qu’il annonça aux élus la création de la Cour de discipline budgétaire ; juridiction qui jugeait les actes non conformes à la réglementation financière. Aujourd’hui, cette juridiction est remplacée par la Cour des comptes.

André Peytavin dont la carrière fut très courte a été très actif dans le mouvement catholique et dans le syndicalisme estudiantin. Responsable national des étudiants de 1951 à 1952, il fut Secrétaire de la Fédération d’Afrique noire pendant quatre ans. Il milita au Comité exécutif du Bloc populaire sénégalais (Bps), puis au sein de l’Union progressiste sénégalais (Ups). Il a eu à diriger aussi le Département des Travaux publics du 12 novembre au 16 décembre 1962 avant de revenir aux Finances (19 décembre 1962 au 09 décembre 1963).

Au titre des décorations, il était titulaire du grade de Commandeur de l’Ordre de la santé, Grand Officier de l’Ordre national, de la Croix du combattant et de la médaille du Commandant volontaire de la résistance. À sa disparition, il laissa une veuve et un garçon.

El Hadji Abdoulaye THIAM



Source : http://lesoleil.sn/portrait-andre-peytavin-un-des-...